Vins de garde ou vins prêts à boire, comment les différencier ?   

 

Un dîner chez des amis, un apéritif en famille, un anniversaire, une naissance, les occasions d’ouvrir une bouteille de vin ne manquent pas dans la vie…Mais c’est souvent dans ces occasions que le choix de la bouteille de vin devient un sujet de doutes. C’est une question que bon nombre d’amateurs/rices de vins se sont posé au moins une fois devant le rayon de vins d’un supermarché ou chez son caviste : quel vin choisir ? L’offre souvent pléthorique ne facilite pas la prise de décision. Comment distinguer une bouteille de vin prêt à être dégusté d’un vin dit de garde qu’il sera préférable de conserver quelques années avant ouverture ? Seul(e) face à ce choix et en l’absence de toute mention sur l’étiquette, vous gagnerez à poursuivre la lecture qui vous dévoilera quelques explications et recommandations.

 

Qu’est-ce qu’un vin de garde ?

Un vin de garde, c’est sans doute une expression que vous avez entendue au détour d’une conversation entre amateurs de vin. Il s’agit d’un vin qu’il est conseillé de consommer après une relative longue conservation idéalement en cave pour des conditions optimales. Au fil du temps, ce type de vins va connaître une lente maturation et gagnera en structure, en équilibre, en richesse et en complexité aromatiques pour finalement révéler toutes ses qualités à son apogée, l’âge idéal de consommation, lors de la dégustation. Les vins rouges connaîtront pendant cette période un adoucissement de leurs tanins.

Mais tous les vins ne se bonifient pas avec le temps et ne sont pas destinés à veillir. Certains vins sont destinés à être bus dans leur jeunesse, peu de temps après leur mise en bouteille, car ils n’ont pas la structure nécessaire pour un bon vieillissement. Seul un petit pourcentage des vins fins sur le marché ont un potentiel de garde et s’anoblissent avec un vieillissement à plus ou moins long terme. Le délai de vieillissement optimal diffère en fonction des régions et des crus. On distingue :

  • les vins de moyenne garde, qui se conservent entre 5 et 10 ans
  • les vins de longue garde qui vieillissent bien entre 10 et 20 ans
  • les vins de très longue garde, pouvant atteindre leur apogée au-delà de 20 ans.

Théoriquement, il est de recommandé d’attendre quelques années pour s’assurer lors de la dégustation qu’un millésime s’est bonifié avec le temps et donc qu’il s’agit bien d’un vin de garde. Toutefois, quelques critères permettent de se faire une idée du potentiel de garde d’un vin sans avoir à attendre toutes ces années. En effet, les vins de garde présentent certaines caractéristiques distinctives communes qui leur permettent de résister au processus de vieillissement et qui peuvent permettre aux œnophiles débutants d’estimer si une bouteille gagnera à être conservée plutôt que consommée tout de suite :

  • La densité (opacité) et la vivacité de la couleur.
  • Tannin : le goût astringent et amer du vin rouge traduit la présence élevée de tanins puissants qui favorisent un bon vieillissement du vin. Ces tanins s’adouciront avec le temps de maturation.
  • L’acidité : une acidité élevée bien marquée présagera d’un bon potentiel de garde puisque l’acidité va baisser avec le temps.
  • Le taux d’alcool: il est généralement plus élevé, plus de 12%. Il aide à préserver le vin et à prolonger sa durée de vie.
  • Des arômes puissants et diversifiés pour que le vin puisse gagner en complexité avec le temps.

Pour les vins blancs, les critères sont un peu différents puisque les tanins sont très peu présents. Comme pour le vin rouge, une bonne acidité et des arômes complexes dès le départ seront essentiels pour la garde d’un vin blanc. Par ailleurs, le sucre est le critère différenciant permettant de garantir un potentiel de garde plus élevé comme pour les vins moelleux et liquoreux du Sauternes par exemple. Le sucre étant un antioxydant, il va ralentir le vieillissement du vin et favoriser une garde plus longue.

 

Identifier le potentiel de garde du vin

Bouteilles de vin rangees sur les etageres d’une cave a vin

©Canva

Les cépages

Les variétés de raisins utilisées dans les assemblages entrent en jeu dans le potentiel de garde d’un vin. Ainsi, pour les vins rouges, certains cépages tels que le Cabernet Sauvignon, le Merlot, le Sangiovese, le Monastrell, le Cabernet Franc, le Nebbiolo, le Malbec, la Syrah et le Tannat sont naturellement riches en tanins et en acidité. Ils seront donc plus propices à la garde par opposition aux Pinots noirs, aux Cinsaults et au Gamay par exemple.

Pour les vins blancs, les cépages tels que le Chenin Blanc, dotés d’une richesse aromatique, d’une acidité naturelle et présentant un fort taux de sucres résiduels seront plus à même d’être gardés.

Ainsi, lorsque vous consulterez l’encépagement sur les contre-étiquettes des bouteilles, vous aurez une première indication intrinsèque du potentiel de garde…Mais seule, elle ne suffira pas.

 

L’importance de la région, du terroir

Certaines régions sont reconnues pour produire des vins qui se prêtent particulièrement à la garde. Parmi les exemples célèbres de vins de garde, on trouve le Bordeaux, le Bourgogne, le Rhône en France, le Barolo (Italie) et le Rioja (Espagne). En règle générale, les vins produits dans ces régions répondent à un cahier des charges d’appellations et sont issus de cépages spécifiques connus pour leur potentiel de vieillissement. La nature des sols (calcaire, argileux, silicieux) de ces terroirs influera également sur la qualité et les caractéristiques des raisins qu’ils engendreront.

 

Le millésime

Le millésime correspond à l’année de vendange d’un vin. Il est de ce fait le témoin des conditions climatologiques auxquelles la vigne a dû faire face. Ainsi, théoriquement, des conditions optimales favoriseront une maturité alcoolique (équilibre sucre/acidité) et une maturité phénolique (peau et pépins), toutes deux à l’origine du développement de tanins et d’arômes. Les régions viticoles en France et à travers le monde n’étant pas soumises aux mêmes conditions climatologiques, la maturité des raisins diffère d’une région à l’autre. C’est pourquoi les vins issus d’un même terroir connaissent souvent les mêmes millésimes de références, considérés comme bons ou meilleurs que d’autres.

Aussi, les régions viticoles en France connaissent des défis climatiques disparates pour chaque nouveau millésime. Toutefois, depuis quelques années déjà, le réchauffement climatique redistribue un peu les cartes, les disparités entre les régions évoluent et les vignerons (lien article métier vigneron) se trouvent dans l’obligation d’adapter leur production (type de cépages, techniques).

 

Le Taux d’alcool

Plus le taux d’alcool dans un vin est élevé plus le vin est susceptible de se garder longtemps. En effet, L’alcool agit comme un conservateur durant la maturation du vin.

 

Types de vinification et d’élevage choisis

Le savoir-faire du vigneron et ses techniques de vinification sont parmi les principaux facteurs d’influence sur l’aptitude du vin à être conservé. Un élevage long (jusqu’à 2 ans en fût de chêne) et l’usage de contenant en bois qui oxygènent le vin lui confèreront une structure tannique plus solide et une plus grande résistance à l’oxydation. La capacité de garde n’en sera que plus longue.

Au contraire, en choisissant une vinification courte, le vigneron préservera la fraîcheur du fruit et n’extraira que peu de tanins. Il en résultera un vin frais et léger, à déguster sans trop attendre.

 

Le prix 

Le prix d’une bouteille de vin peut être également un indicateur. En effet, il existe un lien entre le prix et la qualité d’un vin même si les vins les plus chers ne sont pas forcément les meilleurs. Toutefois, un vin de garde coûte rarement moins de 15€. Mais, avec l’augmentation des coûts de production, cette cohérence est quelque peu mise à mal et semble ne plus être aussi pertinente qu’il y a quelques années. En effet, avec l’inflation, l’augmentation des coûts de production a naturellement obligé les vignerons à la répercuter en partie sur les prix de leurs vins. Plusieurs facteurs vont influencer le prix d’une bouteille de vin : le rendement, la région de production, le millésime, la notoriété du domaine, les méthodes de vinification utilisées.

 

Tester le potentiel de garde

Pour les amateurs qui ont le temps et l’envie d’enrichir leur expérience œnologique, il serait intéressant d’envisager d’acheter un vin par carton de 6 ou 12 bouteilles et d’ouvrir ces dernières progressivement, à des années différentes afin de découvrir les subtilités aromatiques nées de la maturation progressive du vin. Vous pourrez ainsi en apprécier tout son potentiel de garde en prenant soin, bien entendu, de prendre des notes à chacune des dégustations pour aider votre mémoire.

 

Faire confiance à un professionnel

Consulter les fiches techniques

Les fiches techniques des vins sont souvent mises à la disposition des consommateurs par les vignerons eux-mêmes, notamment sur leur site internet. Telles des cartes d’identité, elles contiennent de nombreuses informations sur le vin, telles que le nom du domaine, le nom de la cuvée, l’appellation, le millésime, l’encépagement, le mode de vinification et d’élevage…autant de détails destinés à informer le consommateur et à l’orienter pour la dégustation et la garde.

Parfois, vous pouvez également trouver l’indication d’une fenêtre de dégustation à son apogée sur la contre-étiquette du vin. Information précieuse si vous cherchez un vin à consommer rapidement.

 

Demander conseils directement auprès du vigneron

Lors de l’achat, si vous privilégiez les circuits courts, n’hésitez pas à poser vos questions directement au vignoble pour recueillir des conseils de conservation et de dégustation, le vigneron vous informera au mieux. Les vigneronnes et vignerons conservent généralement des bouteilles issues des différents millésimes afin de faire des dégustations verticales qui permettent de comparer l’évolution d’une cuvée donnée sur plusieurs années.

 

Écouter les recommandations des professionnels du vins

En cas de doute, n’hésitez pas à demander conseils aux professionnels du vin (cavistes, sommeliers). Ils font régulièrement des dégustations qui leur permettent d’évaluer les potentiels de garde des vins et de définir une fenêtre optimale (par tranche d’années) de dégustation. Aussi, ils peuvent être également en contact avec les vignerons auprès desquels ils auront reçu les recommandations de garde et de dégustation.  

 

Les applications

Avec l’arrivée des smartphones, les applications dédiées au vin se sont développées et multipliées. Elles recèlent une multitude d’informations et proposent une approche pédagogique du vin. Certaines d’entre elles permettent d’obtenir toutes les informations d’un vin en prenant en photo l’étiquette de la bouteille. Un outil et un conseiller de choix lorsque vous êtes devant le rayon vin du supermarché !

Ces applications sont destinées à vous accompagner dans votre voyage œnologique, aussi bref soit-il. Les fonctionnalités de certaines d’entre elles ont même été pensées pour vous aider à gérer votre cave en prévoyant la rotation de vos vins, pour trouver la bouteille de vin qui vous correspond ou pour partager vos dégustations. Ainsi, les objectifs de ces applications peuvent différer, le choix est vaste, il vous faudra sans doute en tester plusieurs avant d’en adopter une. Parmi les plus connues ou les plus utilisées, retenez : Idealwine, My Wine,  PLOC, TWIL (The Wine I Love), Vinidaily, Vivino, Smart Cave, Wine advisor, Wine searcher…Vous l’aurez compris, cette liste n’est pas exhaustive. Retrouvez toutes ces applications et bien d’autres dans les stores (Apple store, Play Store).

 

Les vins prêts à boire

Deux verres de vins accompagnées d’une planche de fromages lors d’une degustation

©Canva

Comment savoir si un vin est prêt à boire ou non ?  Contrairement au vin de garde, un vin prêt à boire est un vin qu’il vaut mieux déguster dans sa jeunesse.

Il est une réalité : les vins blancs se conservent moins longtemps que les vins rouges. Par exemple, un Entre-deux-Mers bordelais devra ainsi être dégusté de 18 à 24 mois après la mise en bouteille. Pourtant, parmi les vins qui se conservent le mieux, on retrouve bien les vins blancs liquoreux ! L’exception qui confirme la règle…

De leur côté, les vins rouges prêts à boire sont souvent sans bois, et présentent des tanins peu marqués. Ils rendent compte de leur cépage autour d’arômes primaires de fruits frais, de framboise, de fraise et de fleurs. 

 

Pour conclure

Avec ces quelques éléments, vous aurez compris qu’un ensemble de facteurs influent sur le possible potentiel de garde d’un vin. Gardez en tête également que les conditions de garde entrent également en jeu. Ainsi, pour schématiser, si vous ne possédez pas une cave thermorégulée pour conserver vos bouteilles de vin, il y a de grandes chances que l’apogée de vos vins intervienne plus tôt et que vous puissiez les déguster pour en apprécier toute leur complexité bien avant la fenêtre de dégustation recommandée. 

Mais, in fine, l’important réside dans le plaisir de la dégustation d’un vin. Si vous êtes novice en particulier, suivez votre instinct et vos envies, quitte à vous tromper parfois, c’est comme cela que vous apprendrez à affiner vos choix de bouteille. Bus trop tôt, certains vins complexes n’auront pas encore atteint leur apogée, ils auront encore trop de tout : trop de notes boisées, trop d’alcool, trop d’acidité, trop de tanins. Un vin de garde bu trop tard, sera considéré comme trop vieux, en déclin : ses arômes seront dégradés, ses tanins affaiblis. Faites confiance à vos sens et à votre mémoire pour identifier vos sensations. Et comme vous aurez choisi la bouteille de vin pour la partager, partagez également vos ressentis avec vos convives !